Le Palais Bourbon : un palais vert ?

La discussion au parlement du projet de loi « Lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.» est une occasion de mesurer la différence dogmatique qui existe entre la conférence citoyenne réunie au Conseil économique, social et environnemental (CESE), le Président de la République et la majorité parlementaire qui est en train de s’apercevoir qu’il lui appartient de voter la loi et non de s’en remettre au hasard d’un tirage au sort.

Pour ce qui est de Patrimoine-Environnement, confrontés à une telle réforme, nous constatons que, plus que jamais, nous avons le désir de faire partager l’idée que l’Environnement, le paysage, le cadre de vie sont inséparables du Patrimoine et qu’il s’agit d’un ensemble. Ces deux concepts marquent la civilisation déjà faite et celle qu’il convient de bâtir demain ; paradoxalement, moins nous nous sentons proches de certains radicaux de l’écologie dont ces derniers mois les actions tournent à la caricature : depuis les arbres de Noël artificiels bordelais, la suppression des subventions aux aéroclubs poitevins, la construction de mosquée à Strasbourg  « quo non ascenderunt ! ». Ne parlons pas de défense systématique du moindre bosquet, vite qualifié de forêt primaire, oubliant que la plupart de ces forêts ont été plantées par la main de l’homme.

Sur notre initiative les sept présidents des associations reconnues d’utilité publique dans le domaine du Patrimoine ont décidé, pour réagir, de renouer avec la tradition dite du « G7 ».

Nous sommes tous très préoccupés de la manière dont ce texte a été préparé : aucune concertation préalable avec nous, mais également aucune action interministérielle avec le ministère de la Culture.

Il est évident que nos pauvres associations qui labourent le champ depuis des décennies ne pèsent pas lourd face à l’écoute moderne de citoyens, certes, parfaitement respectables, mais dont l’idée nous effleure parfois qu’ils sont les porte- paroles des experts qu’on leur a fourni.

Nous avons néanmoins tenté de faire passer à l’Assemblée nationale quatre préoccupations :

La première est pour nous, à l’heure où j’écris ces lignes, un échec : nous voulions rendre au préfet la compétence sur les règlements de publicité que le projet lui avait enlevé pour le donner au maire. Les associations spécialisées dans ce domaine craignent que les maires ne puissent pas prendre le recul nécessaire vis-à-vis des pressions, des lobbies. Madame Pompili s’est opposée à l’amendement qui a été rejeté.

Le texte prévoit également de décider par la loi de plans régionaux d’implantation éoliennes à caractère obligatoire. À l’heure où le Président de la République lui même, dans un discours à Pau, a constaté que l’implantation des « grands oiseaux blancs » était de plus en plus mal ressentie par la population, à l’heure où de nombreux maires s’opposent à ces implantations, cette réforme complémentaire à du mal à passer. Un jour ou l’autre on verra des habitants, dépourvus de moyens juridiques, se coucher sur les routes pour empêcher les travaux.

Depuis quelque temps, notre République se consacre régulièrement, dans le domaine du Patrimoine, à des travaux de détricotage : ainsi, alors qu’en 2015 nos associations avaient réussi à faire comprendre au ministère, qui est aujourd’hui celui de madame Pompili, que les constructions d’avant 1948 et celles des trente glorieuses ne devaient pas avoir le même régime d’isolation, leur qualité d’inertie n’ayant rien à voir, le texte débattu revient sur le compromis équilibré de 2015 et impose l’isolation par l’extérieur d’une façon générale. Les constructions en brique en particulier, sauvées cette année-là, sont de nouveau en grand danger.

Enfin, le projet de loi a décidé, comme le lui demandait la convention, de supprimer au maximum l’artificialisation des sols. Il faut comprendre par là, en particulier, les énormes emprises des grandes surfaces de distribution à l’entrée des villes. La commission spéciale a décliné ce thème en créant toute une série d’articles nouveaux. Mais, trois fois hélas, les lobbies sont passés par là et ont obtenu de la commission une dérogation pour les surfaces commerciales de moins de 10 000 m2.

Autant dire que les beaux principes ne serviront à rien…

Nous n’avons pas grande espérance devant la Chambre basse, nous nous mobiliserons donc de plus fort devant la Chambre haute.

En attendant vous pouvez nous aider en adressant cet édito à votre député !

Alain de la Bretesche,
Président de la Fédération Patrimoine-Environnement