Edito – Du confinement des délais de recours et des procédures jusqu’au 24 juin prochain, au moins…

Éoliennes de Fécamp vues depuis le quai Bérigny © Frédéric Bisson

La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 du 23 mars 2020 a déclaré l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 24 mai prochain. Elle a également autorisé le gouvernement à prendre toute mesure relevant du domaine de la loi afin de faire face aux conséquences, notamment de nature administrative ou juridictionnelle, de la propagation de l’épidémie et des mesures prises, comme le confinement, pour limiter cette propagation.

C’est ainsi qu’a été adoptée, le 25 mars, une ordonnance relative à la prolongation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période. Elle prévoit que « tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, etc. » qui aurait dû être accompli entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020[1] « sera réputé avoir été fait à temps » s’il est effectué, à compter du 24 juin prochain, dans le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.

Autrement dit, tous les délais de recours sont « confinés » au moins jusqu’au 24 juin !

Et ces dispositions s’appliquent tant en matière judiciaire qu’en matière administrative, c’est-à-dire dans les relations avec des administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics administratifs, ou autres organismes chargés d’une mission de service public administratif : les délais propres à l’action administrative sont donc suspendus, tant du côté de l’administration que des administrés.

S’agissant des procédures d’enquête publique, elles sont également par principe suspendues[2], sauf si le retard résultant de leur interruption « est susceptibles d’entrainer des conséquences difficilement réparables dans la réalisation de projets présentant un intérêt national et un caractère urgent ». Dans ce cas, l’autorité compétente pourrait décider qu’une enquête se poursuive uniquement par des moyens électroniques dématérialisés ou qu’une nouvelle enquête sera conduite par de tels moyens[3]. Cette exception à la règle risque de donner lieu à interprétation et d’être source de nouveaux contentieux, même si le confinement s’applique également, sauf exception, aux juridictions de l’ordre administratif…

Loïc Dusseau,
Avocat au barreau de Paris,
Membre du bureau de Patrimoine-Environnement


[1] Ce 24 juin 2020 correspond à la date de l’expiration d’un délai d’1 mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré, pouvant, si nécessaire, être prorogée par une nouvelle loi.

[2] Par exemple, les enquêtes publiques relatives aux demandes d’autorisation environnementale en vue d’exploiter des parcs éoliens sur les communes de Rollot (80), Mortemer (60) et le Festoy-Vaux (60) décidées par arrêtés du 12 mars 2020 pour se tenir du 16 avril au 18 mai devraient être reportées.

[3] Par exemple dans l’Allier : http://www.journaldelenvironnement.net/article/ces-enquetes-publiques-maintenues-pendant-le-confinement,104740