Un rapport nouveau du Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable (CGEDD) en matière de formation des élus au paysage … à suivre

Le CGEDD a produit, en octobre dernier, un rapport portant sur un projet de sensibilisation et de formation des élus locaux dans le domaine du paysage.

Ce rapport a tiré les conclusions d’une enquête menée en juin-juillet 2021 qui a recueilli près de 1400 réponses, ce que l’on peut statistiquement considérer comme étant un échantillon représentatif des principaux types de communes, parmi lesquelles une très grande majorité en provenance des élus les plus récents.

Parmi ces réponses, les quatre-cinquièmes expriment le besoin d’un renforcement des compétences et connaissances des élus concernés sur le paysage.

Pour ces élus, le paysage représente une thématique d’avenir dans leurs préoccupations, liée à celle, plus large, du « cadre de vie ». Ainsi considèrent-ils le paysage en tant que politique publique à mener.

Les trois quarts d’entre eux estiment que le paysage s’est amélioré, dont plus de 40% des élus urbains.

Les leviers d’actions plébiscités sont au premier rang les outils d’urbanisme, plus que les politiques spécifiquement dédiées au paysage. 

Trois sources de compétences sont sollicitées à peu près à égalité : les services de l’État, les CAUE et leurs propres services techniques.

La préférence exprimée par les élus en termes de formation et de sensibilisation va aux visites commentées de terrain accompagnées d’un professionnel qualifié.

Patrimoine, biodiversité, agriculture et forêt leur apparaissent comme des thèmes importants directement associés au paysage.

Le thème des énergies n’est cité que dans à peine plus du cinquième des réponses, ce qui nous apparaît symptomatique de la surenchère dont celui-ci fait l’objet dans la politique gouvernementale, face en particulier à la préservation du patrimoine et du cadre de vie et alors même que, rappelons-le, la France est en tête des destinations touristiques au monde.

On peut plus précisément relever les points suivants qui peuvent guider les actions de notre Fédération :

–        seulement près de 15 % des opinions considèrent paradoxalement, que la commune représente un « lieu dont l’évolution doit être cultivée ou maîtrisée » ce qui appelle une prise de conscience nécessaire pour notamment éviter l’étalement urbain et accorder la priorité à la restauration/réhabilitation de l’habitat ancien (qui lui même souffre souvent de déshérence) en regard d’une construction neuve intensive ;

–        seulement 30% des opinions associent paysage et préservation du patrimoine, le paysage n’apparaissant essentiellement qu’en tant que « cadre de vie agréable » préférentiellement attaché à la campagne comme si, notamment, le paysage urbain n’entrait pas dans la notion de paysage, loin donc de la définition adoptée par la convention européenne du paysage qui consacre l’omniprésence de ce dernier ;

–        le quart seulement des opinions adhère à l’idée de « France moche » provoquée par une dégradation du paysage ; il serait bienvenu de confronter cette dénégation à celle du rejet massif constaté auprès de la population et des élus eux-mêmes d’une focalisation sur un développement excessif de l’éolien ; il faudra donc décloisonner et rééquilibrer les approches entre préservation du patrimoine et des paysages, et développement de l’énergie éolienne ; 

–        parmi les défis auxquels les élus ont le sentiment de devoir être confrontés à l’avenir, figure logiquement en tête la planification urbaine (à mettre en relation avec l’impulsion étatique de l’objectif d’une « zéro artificialisation nette » (ZAN)), tandis que figure en fin de liste des préoccupations la « protection, gestion ou aménagement des alignements d’arbres » sujet sur lequel nous nous battons actuellement pour que la loi dite « 3D » n’affaiblisse pas les dispositions actuelles du code de l’environnement. Ce constat nous impose donc une grande vigilance.

Il est clair que cette enquête est bienvenue à une époque où règnent des politiques d’aménagement contradictoires qui, au niveau des élus locaux, ne peuvent que créer trouble et confusion. Elle intervient de plus au moment charnière d’un basculement de l’échelle communale à l’intercommunalité qui impose un redoublement des efforts de formation, jusqu’à présent singulièrement absents dans le domaine du paysage et des patrimoines. Espérons simplement que les actes suivront l’intention et que le ministère compétent mettra en œuvre concrètement une réelle démarche de formation dans ce champ.

Dominique Masson – Secrétaire général de la Fédération Patrimoine-Environnement