Pour une forêt durable

La forêt, les étangs et les plaines fécondes
Ont plus touché mes yeux que les regards humains,
Je me suis appuyée à la beauté du monde
Et j’ai tenu l’odeur des saisons dans mes mains.

Anna de Noailles, L’offrande à la nature

Occupant en effet 30% du territoire français, l’hexagone vu du ciel est vert ! Si l’Office National des Forêts se félicite que leur surface ait doublé en 200 ans, c’est bien qu’il n’en a pas toujours été ainsi : elle a subi la forte pression exercée au XIX ème par la révolution industrielle et maintenant elle bénéficie de la déprise agricole.

Pour perdurer elles doivent faire l’objet d’une bonne gestion, comme les forestiers l’ont compris depuis fort longtemps. La situation de la forêt française est caractérisée par une forte fragmentation. La forêt privée est répartie entre de grands propriétaires, mais aussi en une multitude de petits propriétaires privés qui détiennent, souvent sans le savoir, d’innombrables parcelles souvent très petites : on dénombre en effet pas moins de 4 millions de propriétaires de ce type.

La forêt publique propriété de l’État, de collectivités territoriales, ou d’établissements publics ne représente que 25% de la surface forestière. Cette disparité a pour conséquence de complexifier la gestion, mais de plus en plus le regroupement des parcelles est fortement recommandé.

La forêt, une ressource inestimable :

Le domaine public forestier est géré par l’ONF dont les objectifs sont de « fournir du bois à la société, préserver l’environnement et accueillir le public ». L’État exerce également un droit de regard sur la gestion des forêts privées, dont la surface est supérieure à 25 hectares, en établissant un plan simple de gestion. Les propriétaires privés peuvent également se référer au Centre National de la Propriété Forestière – CNPF ou régionalement au CRPF et à des coopératives pour les aiguiller dans la gestion de leur forêt. La forêt est concernée par les trois piliers, économique, environnemental et social, du développement durable :

  • Elle est à la fois une source d’énergie et de matière première (filière bois)
  • Elle permet le stockage du carbone
  • Elle est au coeur de notre écosystème du fait de son rôle dans la protection des sols et de l’eau
  • Elle joue un rôle actif dans qualité des paysages
  • Elle a une fonction sociale : l’accueil du public en forêt
  • Elle est une source d’emplois

La nécessité de recourir à un gestion durable des forêts :

La gestion d’une forêt n’est pourtant pas chose aisée, elle a été de tout temps façonnée par les hommes, et elle doit également être entretenue pour être pérenne. Cela nécessite de procéder à des coupes de gestion ou d’exploitation. Il existe, en effet, tout un panel de coupes d’arbres : des coupes dites d’éclaircie, d’amélioration ou encore de régénération permettant aux différentes espèces de bénéficier de l’espace nécessaire et d’un apport en lumière suffisant. Dans certaines situations de déséquilibre forêt-ongulés, des clôtures peuvent être installées pour protéger les jeunes pousses de la dent du gibier.

La gestion d’une forêt durable implique que la forêt soit jardinée. Bien loin d’épuiser les ressources de la forêt, le bois doit être coupé pour que la forêt se régénère ; le but est le renouvellement des peuplements, tout en permettant à long terme de récolter les mêmes volumes de bois qu’avec d’autres formes de gestion, tout en évitant de devoir procéder à des coupes intensives.

La mise en place d’une vision d’ensemble conçue pour renforcer la compétitivité de le France dans ce secteur s’est traduite par le programme PEFC [Program for the Endorsement of Forest Certification schemes] qui « certifie la gestion durable des forêts et rassemble autour d’une vision multifonctionnelle et équilibrée de la forêt dans 53 pays à travers le monde. Présent depuis plus de 20 ans en France, il doit garantir les forêts durables ». La certification se fait donc sur la base d’un cahier des charges auquel tous les propriétaires souhaitant être certifiés PEFC doivent se plier. Ce label s’adapte aux spécificités des forêts tout en se présentant comme la garantie de la forêt durable. Il repose sur la certification de la gestion durable de la forêt d’où provient le bois et, ensuite, sur celle de la chaîne de contrôle des entreprises de transformation, permettant de suivre le bois, depuis la forêt jusqu’au consommateur final. La souplesse du dispositif conduit parfois à penser à un cahier des charges trop leste, se rapprochant plus d’une charte et permettant à certains de formuler des critiques.

L’une des plus fréquentes -ou des plus entendues- est certainement le fait que ce label permettrait d’effectuer des « coupes rases ».

Les coupes rases en question :

Les expressions « coupe rase », « coupe à blanc » et « coupe à blanc-étoc » désignent, en sylviculture, un mode d’aménagement sylvicole passant par l’abattage de la totalité des arbres d’une parcelle d’une exploitation forestière. Les coupes rases sont nécessaires lorsque l’on veut changer l’essence en place ou que l’on veut défricher. Le concept est proche de celui de la « coupe claire ”.

Les coupes de bois doivent en principe s’inscrire dans une gestion raisonnée de la forêt ; la coupe rase apparaît au premier abord antinomique d’une gestion durable. Il faut tout de même rappeler qu’elles sont limitées à 2 ou 4 hectares selon les départements et les coupes de plus grande ampleur doivent faire l’objet d’une demande d’autorisation préalable. En outre, d’autres protections tels les zones Natura 2000 ou les sites classés permettent d’en prohiber la pratique. L’enjeu réside dans le fait de savoir ce que l’on coupe et pourquoi on le coupe. Des forêts de monoculture, des forêts non entretenues dont les arbres sont atteints de maladies, nécessitent des coupes rases. Il peut s’agir d’un investissement sur l’avenir. Raser est d’ailleurs, dans le cadre d’une gestion durable, assortie d’une obligation de reboisement de la parcelle pour reconstituer le capital forestier, ce qui permet à terme de préserver la ressource. Enfin, lorsqu’elles sont autorisées, un certain nombre de précautions doivent être prises : par exemple la préservation des cours d’eau ou des niches écologiques pour la faune (tels des arbres morts ou à cavités), la protection de milieux humides ou sensibles à l’érosion (grâce aux techniques de câble-mat). Il ne s’agit donc pas de banaliser ce procédé, qui ne doit et ne peut pas l’être en tout état de cause, il convient d’en renforcer les contours.

Conclusion :

La forêt joue un rôle primordial pour le développement durable, elle concilie en effet les intérêts environnementaux et écologiques, tout en assurant le renouvellement de la ressource. Les forestiers sont engagés dans la gestion durable des forêts, ce qui est plus que jamais primordial.
La Fédération Patrimoine-Environnement, bien consciente de la nécessité de communiquer sur cette composante de l’environnement, a choisi en 2021 de proposer pour Les Journées du Patrimoine de Pays et des Moulins le thème : L’Arbre vie et usage. Cette manifestation est l’occasion de rappeler que les arbres occupent une place centrale dans nos vies et qu’ils se retrouvent aujourd’hui au cœur des problématiques environnementales. Ressource naturelle, élément de biodiversité, c’est aussi un marqueur de paysage important dans nos villes et campagnes. Le bois, matériau renouvelable et durable, utilisé et travaillé depuis des siècles est un élément patrimonial indispensable dans la construction.