Reims : Le patrimoine du XXème siècle classé en Site patrimonial remarquable

Le 28 mai 2020, le ministère de la Culture a pris un arrêté de classement en Site patrimonial remarquable de la Ville de Reims, publié lundi 7 juin au Journal Officiel de la République. Le centre-ville de Reims est désormais protégé par cet outil juridique -que la ville avait déjà mis en place pour la colline de Saint-Nicaise.
Catherine Coutant conseillère en charge du patrimoine rémois, ainsi que Elisabeth Chauvin, responsable du patrimoine de la ville, ont répondu à nos questions.

Immeuble de rapport Kodak, à l’angle des rues de Vesle et des Capucins, date de construction : 1930, architecte : Lucien Gillet (entrepreneur et propriétaire) © Fab5669

La fédération Patrimoine-Environnement s’intéresse à ce classement concernant la protection du patrimoine, mais aussi pour ses abords, pouvez-vous nous en dire plus sur les nouveautés apportées depuis l’approbation de l’Aire de mise en Valeur de l’Architecture et du Patrimoine (AVAP) en 2016 ?

Tout d’abord, la Ville de Reims possède un patrimoine diversifié allant de la période gallo-romaine jusqu’au XXème siècle. Le centre-ville a connu des destructions lors de la Première Guerre mondiale ce qui a fait l’objet d’un important essor de l’architecture rémoise dès les années 1920.
Il s’est passé deux étapes dans le processus de protection de ce patrimoine. D’une part, la colline Saint-Nicaise à Reims fait partie de l’ensemble des coteaux, maisons et caves de Champagne inscrit depuis 2015 sur la liste du Patrimoine mondial par l’Unesco. Dans cette démarche, l’ancien faubourg médiéval de Saint-Nicaise, l’ancienne abbaye Saint Remi (inscrite au Patrimoine mondial depuis 1991), les cités-jardins du Chemin-Vert et de la Verrerie datant des années 1920 et les caves de Champagne ont fait l’objet d’une servitude d’utilité publique au travers d’une Aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine (AVAP) en 2016.
Par la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (LCAP) du 7 juillet 2016, la collectivité a choisi de s’engager réellement dans une politique patrimoniale. N’ayant pas instruit de Secteur sauvegardé, il a été décidé de réaliser un Site patrimonial remarquable (SPR), nouvel outil de la loi LCAP, afin de revaloriser le patrimoine de la reconstruction dont le périmètre de protection démarre où se termine l’AVAP. Le SPR prend alors en compte tout le quartier du centre-ville, ayant comme épicentre, la cathédrale de Reims.

Que va concrètement apporter le SPR à la Ville de Reims en termes de plus-values et d’outils ?

Pour mener à bien la création du SPR, la réalisation d’un inventaire des immeubles de la reconstruction du XXème siècle semblait indispensable. Il n’y en avait jamais eu auparavant.
En lien avec l’Etat, cette mission est effectuée par la Région Grand Est et un prestataire, le cabinet d’architecture Caillault dont la démarche de relevé de l’inventaire est de raisonner « à la parcelle ». En effet, ce repérage de terrain par parcelle apporte plus de cohérence dans la compréhension de la ville que l’approche par bâtiment uniquement. On intègre ainsi de façon uniformisée les ensembles bâtis afin de donner une lecture plus urbaine que géographique.
Concernant les documents et les outils d’urbanisme, des projets lourds mais importants sont entrepris. Les équipes travaillent sur l’élaboration d’un Plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) qui sera un document de préservation du patrimoine se substituant au Plan local d’urbanisme (PLU). La connaissance du périmètre du SPR a des conséquences sur le plan de gestion Unesco notamment le bâti et les abords que ce soit pour la cathédrale et l’ensemble de coteaux, maisons, et caves de Champagne. Il y a une vraie logique à respecter puisque ces documents concernent les mêmes lieux à protéger. Ce travail d’ingénierie s’effectue en interne avec des juristes du service de l’urbanisme et des architectes du service du patrimoine ayant une approche différente et rationnelle. L’Association des maires de France et Sites & Cités remarquables de France apportent aussi un appui sur les expériences des autres collectivités dans ces démarches.

Reims est depuis 1987 reconnue Ville d’Art et d’Histoire, quels changements va apporter le classement en SPR ?

Depuis 1987, la convention Ville d’Art et d’Histoire passée avec l’Etat a été renouvelée une première fois en 2006.
Désormais, il convient de réviser la convention pour une remise à plat des éléments à mettre à jour, notamment dans le fonctionnement du service patrimoine de la Ville puisque le SPR a un volet valorisation. Les actions de médiation se verront renforcées pour prendre en compte le patrimoine du XXème siècle.
La Ville de Reims s’engage dans une vraie dynamique de protection et de valorisation de son patrimoine – à la fois pour les Rémois, au travers de son histoire pendant et après la Première Guerre mondiale, et aussi pour les touristes.

29-31 rue de Mars, Reims – Immeuble de rapport, date de construction 1923, architecte : Herbé-Deffaux, Béton apparent, mosaïques et ferronneries : Borderel-Robert © Clelie Mascaret
Rue du Temple, Centre de Reims – Immeubles Art Déco en face des Halles du Boulingrin © Fred Romero

Propos recueillis par Léa Saurin.

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