Avignon veut donner un avenir à son histoire

Avignon, capitale de la chrétienté pendant le XIVème siècle doit, souvent avec l’aide de l’État ou de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, entretenir un patrimoine considérable à l’intérieur de ses cinq kilomètres de remparts. Cela concerne en premier lieu le Palais des Papes, 15 000 m² de surface, le plus important ensemble gothique du monde, classé au Patrimoine Mondial de l’Unesco. Ce géant est sans cesse restauré, comme actuellement à hauteur de 5 millions d’euros pour ses deux jardins historiques et deux de ses tours de plus de cinquante mètres de haut.

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Vue aérienne du Palais des Papes

Avec une cinquantaine de monuments historiques classés et son célèbre pont, cette « Ville d’Art et d’Histoire » doit préserver un patrimoine important comme la Collégiale Saint-Agricol de 1322 ou la Chapelle du Bienheureux Pierre de Luxembourg de 1425, mais aussi des hôtels particuliers et des édifices civils. Trois exemples illustrent des approches différentes choisies pour parvenir à réaliser certaines de ces nombreuses rénovations : le Palais du Roure de 1469, l’Hôtel des Monnaies de 1619 et l’ancienne prison Sainte-Anne de 1871.

  • Le Palais du Roure : rénover de façon classique pour conserver un lieu d’exception.
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Le Palais du Roure restauré

Les banquiers florentins Baroncelli-Javon occupèrent le Palais du Roure de 1492 à 1908. Jeanne de Flandreysy, femme de lettres, amie de Frédéric Mistral, écrivain et poète provençal, en fit après son achat en 1918 un « Institut Méditerranéen ». Cent ans plus tard, ce monument historique de 800 m² devenu « Centre d’études sur la Provence et les cultures latines » et musée a dû être rénové, façades, toitures et intérieur pour retrouver son lustre d’antan. Il s’agit là d’une démarche partagée par nombre de collectivités publiques : renforcer la beauté de la ville et l’attrait des lieux historiques au prix ici d’un million d’euros et souvent grâce à un effort financier permanent de conservation.

  • L’Hôtel des Monnaies : vendre un monument pour le sauvegarder, tout en conservant une part de ce lieu de l’histoire urbaine.
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L’Hôtel des Monnaies

Face au Palais des Papes, l’Hôtel des Monnaies a été édifié en 1619 par le vice-légat J.-F.de Bagni pour y battre monnaie. Sa façade présente un décor sculpté magnifique : tiare pontificale, aigle et dragon, armoiries du Pape Paul V et du Légat en titre le Cardinal Borghese. Pour redonner vie à ce monument historique délaissé depuis plusieurs années, la Ville vient de le vendre 2,6 millions d’euros à des investisseurs qui feront 4,5 millions de travaux pour créer une « Boutique – Hôtel » de 34 chambres. Dans la partie donnant sur la place du Palais des Papes, la Ville disposera de 300 m2 pour animer un « Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine »(CIAP): « La Maison des avignonnais », contrepartie de son classement comme « Ville d’Art et d’Histoire ».

  • L’ancienne prison Sainte-Anne : transformer une prison en un lieu de vie et revivifier tout un quartier.
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Le projet de réhabilitation de l’ancienne prison Sainte-Anne

Cette « Maison Royale des Insensés » devenue prison en 1871, désaffectée en 2003, deviendra en 2020 un élément de dynamique urbaine dans un quartier situé à l’arrière du Palais des Papes. Ce projet de 25 millions d’euros porté par des investisseurs privés comprendra sur 8000 m² : des logements pour des personnes âgées et des étudiants, des commerces, des parkings, une auberge de jeunesse, etc.  Une « friche artistique et culturelle » de 700 m² sera mise en contrepartie à la disposition de la Ville qui proposera des ateliers à de jeunes artistes et à des artisans d’art. Intégrant la chapelle des Pénitents Noirs de la Miséricorde, confrérie créée au XVIème siècle pour assister les prisonniers et les condamnés, cet ensemble devrait servir de catalyseur pour moderniser le périmètre historique qui l’entoure.

La nécessité de trouver des solutions originales pour conserver le patrimoine se double d’autres efforts pour organiser l’espace public dans un centre historique ceinturé de rempart comme celui d’Avignon. Apaiser le cœur de la cité, concilier la circulation automobile  et la déambulation des résidents et des centaines de milliers de touristes constitue un autre chantier de plusieurs millions d’euros pour la Ville d’Avignon. L’enjeu est de trouver un équilibre entre rues piétonnes, politique de stationnement et la dynamique commerciale indispensable au développement du centre-ville qui doit conserver sa population, des activités administratives et culturelles pour renforcer l’attractivité touristique, etc et demeurer un centre de vie.

 

Bernard Gamel-Cazalis,
Vice-président de la Fondation Calvet en Avignon
Ancien délégué Patrimoine-Environnement pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur