Reconstruction de la flèche de la basilique de Saint-Denis

Dresde, Varsovie, le château de Berlin, le palais des Tuileries, la flèche de la basilique de Saint-Denis… autant de monuments qui ont vu ou voient aujourd’hui un projet de reconstruction.

C’est la charte dite de Venise, qui depuis 1965, encadre les principes de restauration et de conservation des monuments. Adoptée lors du IIe Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques, elle ne semble pas trancher en faveur de la reconstruction.

Malgré l’avis (consultatif) défavorable de la Commission nationale des monuments historiques, le Président François Hollande, en visite à la cathédrale historique des rois de France a entériné le projet de reconstruction de la flèche nord qui dominait l’édifice de 1219 à 1846.

Le projet soutenu par les élus locaux, sera subventionné notamment par des visites payantes du chantier. Le public pourra y découvrir les métiers du patrimoine : tailleur de pierre, ferronnier, charpentier… Le début des travaux est prévu en septembre, pour une durée de sept ans.


La Charte de Venise – Charte Internationale Sur la Conservation et la Restauration des Monuments et des Sites

Chargées d’un message spirituel du passé, les oeuvres monumentales des peuples demeurent dans la vie présente le témoignage vivant de leurs traditions séculaires. L’humanité, qui prend chaque jour conscience de l’unité des valeurs humaines, les considère comme un patrimoine commun, et, vis-à-vis des générations futures, se reconnaît solidairement responsable de leur sauvegarde. Elle se doit de les leur transmettre dans toute la richesse de leur authenticité.
Il est dès lors essentiel que les principes qui doivent présider à la conservation et à la restauration des monuments soient dégagés en commun et formulés sur un plan international, tout en laissant à chaque nation le soin d’en assurer l’application dans le cadre de sa propre culture et de ses traditions.
En donnant une première forme à ces principes fondamentaux, la Charte d’Athènes de 1931 a contribué au développement d’un vaste mouvement international, qui s’est notamment traduit dans des documents nationaux, dans l’activité de l’ICOM et de l’UNESCO, et dans la création par cette drenière du Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels. La sensibilité et l’esprit critique se sont portés sur des problèmes toujours plus complexes et plus nuancés ; aussi l’heure semble venue de réexaminer les principes de la Charte afin de les approfondir et d’en élargir la portée dans un nouveau document.
En conséquence, le IIe Congrès International des Architectes et des Techniciens des Monuments Historiques, réuni, à Venise du 25 au 31 mai 1964, a approuvé le texte suivant :

DÉFINITION

Article 1.
La notion de monument historique comprend la création architecturale isolée aussi bien que le site urbain ou rural qui porte témoignage d’une civilisation particulière, d’une évolution significative ou d’un événement historique. Elle s’étend non seulement aux grandes créations mais aussi aux oeuvres modestes qui ont acquis avec le temps une signification culturelle.

Article 2.
La conservation et la restauration des monuments constituent une discipline qui fait appel à toutes les sciences et à toutes les techniques qui peuvent contribuer à l’étude et à la sauvegarde du patrimoine monumental.

Article 3.
La conservation et la restauration des monuments visent à sauvegarder tout autant l’oeuvre d’art que le témoin d’histoire.

CONSERVATION

Article 4.
La conservation des monuments impose d’abord la permanence de leur entretien.

Article 5.
La conservation des monuments est toujours favorisée par l’affectation de ceux-ci à une fonction utile à la société ; une telle affectation est donc souhaitable mais elle ne peut altérer l’ordonnance ou le décor des édifices. C’est dans ces limites qu’il faut concevoir et que l’on peut autoriser les aménagements exigés par l’évolution des usages et des coutumes.

Article 6.
La conservation d’un monument implique celle d’un cadre à son échelle. Lorsque le cadre traditionnel subsiste, celui-ci sera conservé, et toute construction nouvelle, toute destruction et tout aménagement qui pourrait altérer les rapports de volumes et de couleurs seront proscrits.

Article 7.
Le monument est inséparable de l’histoire dont il est le témoin et du milieu où il se situe. En conséquence le déplacement de tout ou partie d’un monument ne peut être toléré que lorsque la sauvegarde du monument l’exige ou que des raisons d’un grand intérêt national ou international le justifient.

Article 8.
Les éléments de sculpture, de peinture ou de décoration qui font partie intégrante du monument ne peuvent en être séparés que lorsque cette mesure est la seule susceptible d’assurer leur conservation.

RESTAURATION

Article 9.
La restauration est une opération qui doit garder un caractère exceptionnel. Elle a pour but de conserver et de révéler les valeurs esthétiques et historiques du monument et se fonde sur le respect de la substance ancienne et de documents authentiques. Elle s’arrête là où commence l’hypothèse, sur le plan des reconstitutions conjecturales, tout travail de complément reconnu indispensable pour raisons esthétiques ou techniques relève de la composition architecturale et portera la marque de notre temps. La restauration sera toujours précédée et accompagnée d’une étude archéologique et historique du monument.

Article 10.
Lorsque les techniques traditionnelles se révèlent inadéquates, la consolidation d’un monument peut être assurée en faisant appel à toutes les techniques modernes de conservation et de construction dont l’efficacité aura été démontrée par des données scientifiques et garantie par l’expérience.

Article 11.
Les apports valables de toutes les époques à l’édification d’un monument doivent être respectés, l’unité de style n’étant pas un but à atteindre au cours d’une restauration. Lorsqu’un édifice comporte plusieurs états superposés, le dégagement d’un état sous-jacent ne se justifie qu’exceptionnellement et à condition que les éléments enlevés ne présentent que peu d’intérêt, que la composition mise au jour constitue un témoignage de haute valeur historique, archéologique ou esthétique, et que son état de conservation soit jugé suffisant. Le jugement sur la valeur des éléments en question et la décision sur les éliminations à opérer ne peuvent dépendre du seul auteur du projet.

Article 12.
Les éléments destinés à remplacer les parties manquantes doivent s’intégrer harmonieusement à l’ensemble, tout en se distinguant des parties originales, afin que la restauration ne falsifie pas le document d’art et d’histoire.

Article 13.
Les adjonctions ne peuvent être tolérées que pour autant qu’elles respectent toutes les parties intéressantes de l’édifice, son cadre traditionnel, l’équilibre de sa composition et ses relations avec le milieu environnant.

SITES MONUMENTAUX

Article 14.
Les sites monumentaux doivent faire l’objet de soins spéciaux afin de sauvegarder leur intégrité et d’assurer leur assainissement, leur aménagement et leur mise en valeur. Les travaux de conservation et de restauration qui y sont exécutés doivent s’inspirer des principes énoncés aux articles précédents.